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31.03.2021

Entrevue avec Nora Bouazzouni

Qui de mieux que la journaliste Nora Bouazzouni, autrice de Faiminisme : quand le sexisme passe à table, publié en 2017 aux éditions Nouriturfu, pour parler des violences dans le monde du travail et plus particulièrement auprès des femmes ? Un entretien passionnant où nous avons parlé de féminisme, des coulisses de la gastronomie, de journalisme et de son second livre - disponible dès le 22 avril - Steaksisme : en finir avec le mythe de la végé et du viandard.

 

 

« Pourquoi dans les pubs il n’y a QUE les femmes qui jouissent en mangeant du chocolat ? »

On peut en savoir plus au sujet de ce nouvel ouvrage ?

Bien sûr ! Dans ce livre je m’intéresse à la manière dont on a construit un goût genré. Comment le marketing façonne nos manières de nous nourrir et perpétue les stéréotypes. Je parle de toute la sémiotique dans les slogans des produits destinés aux femmes : plaisir, culpabilité, tabou de la sexualité, etc. Pourquoi dans les pubs il n’y a QUE les femmes qui jouissent en mangeant du chocolat ? J’évoque également les conséquences des régimes de genre sur les troubles du comportement alimentaire, les maladies cardio-vasculaires, l’environnement… Pourquoi en Suède, quand on fait des études sur les hommes à qui l’on diagnostique un cancer de la prostate, 25 % préfère mourir que réduire leur consommation de viande ?

 

Par sentiment de castration ?

On pourrait dire ça ! Devenir végétarien, par exemple, c’est encore aujourd’hui rejoindre la masculinité subalterne : on n’est plus tout à fait un homme, il y a même « présomption » d’homosexualité tout ça parce qu’on ne mange plus d’animaux morts… Certains sont aussi persuadés que ces hommes ont adopté un tel régime sous l’influence de leur compagne ; donc des hommes dominés, faibles… Pourquoi ? Parce que la masculinité hégémonique (pas la plus répandue, mais la plus acceptable) exige des hommes qu’ils aient un comportement de dominant, violent et farouchement autonome. Résultat ? Certains s’abstiennent d’adopter ce genre de régime ou bien des comportements écolos par peur d’être exclus de cette masculinité acceptable, du boys’ club.

 

« Le patriarcat impacte aussi les hommes, on se bat pour tout le monde »

Faiminisme est très documenté, rempli de références. Doit-on s’attendre à autant de rigueur ?

Oui. C’est un essai sociologique même si, évidemment, il contient des réflexions personnelles. Le but n’est pas de faire du cherry picking en prenant seulement ce qui m’arrange et en passant sous silence le reste. De plus, si je ne veux pas être taxée d’idéologue ou de propagandiste, je me dois d’avoir un discours scientifique et d’apporter des preuves à chaque argument avancé. En tant que féministe, la moindre erreur nous discrédite. Lorsqu’on est visible - ou un peu grande gueule - il y a des personnes qui n’attendent qu’une chose, c’est que vous vous trompiez ou que vous vous contredisiez.

 

Le sujet du féminisme génère des réactions virulentes.

Certains n’ont pas envie de discuter et refusent de s’intéresser au sujet, de s’instruire, de lire des livres féministes, etc. Ils sont simplement présents pour te dire que tu as tort et que tu es misandre. On ne peut pas juste parler calmement de l’égalité ? D’autres me disent qu’ils ne sont pas concernés. Tu es un être humain, tu vis dans une société donnée - patriarcale qui plus est - tu es forcément concerné. Le patriarcat impacte aussi les hommes, on se bat pour tout le monde.

 

« Je crois qu’il y a une plus grosse pression encore sur les hommes à devoir prouver, sans arrêt, qu’ils sont de « vrais » hommes »

Si les hommes avaient vraiment confiance en eux, ils s’affranchiraient de cette pression, non ?

Tout à fait. Les hommes qui ont confiance dans leur « virilité » n’ont pas de problème à adopter des comportements dits féminins ; des études existent à ce sujet. Ils n’ont pas besoin de surperformer le genre masculin ou de trouver des excuses pour continuer à manger du steak 4 fois par jour. Je crois qu’il y a une plus grosse pression encore sur les hommes à devoir prouver, sans arrêt, qu’ils sont de « vrais » hommes.

 

Ce manque de confiance en soi serait-il l’un des facteurs des violences en cuisines ? N’y aurait-il pas une crainte d’être exclu si on n’est pas sexiste ?

C’est ça ! C’est faire partie du groupe et être validé en tant qu’homme. Une amie Cheffe me racontait il y a quelques mois qu’un gamin d’environ 18 ans, pensant justement faire corporation, avait tenu des propos d’une misogynie hallucinante à son arrivée ; elle l’a recadré instantanément. Mais c’est la masculinité par défaut. Forcément, quand vous avez un environnement, une socialisation depuis l’enfance qui encourage la violence, la domination, le fait de ne pas exprimer ses sentiments, etc., c’est difficile de se détacher de ce carcan de genre et de ce qu’on attend de nous, en tant qu’homme ou femme. L’autorité, la violence, l’humiliation, etc., sont des traits codés comme masculins et respectés au contraire de la douceur, de la communication ou de la bienveillance. Certains commencent à vouloir changer de schéma parce que, justement, ils ont subi ces violences en cuisine et ne souhaitent pas les perpétuer. Il faut rappeler qu’on peut commencer une formation en restauration dès 14 ans. Donc quand on apprend à un gamin - on reste un enfant à cet âge-là - que c’est normal de tenir des propos racistes, homophobes, sexistes, de mettre des mains au cul, de faire des blagues sur le viol, parce que le Chef fait la même chose… C’est très dur de se défaire de ce mimétisme.

 

« On se fout de savoir ce qui se passe dans les coulisses tant que les richissimes clients étrangers viennent dépenser leur argent : c’est l’image de la France qui est en jeu, son excellence culinaire »

Et puis, il y a une grosse omerta médiatique sur ce sujet des violences en cuisine. On décrit souvent les Chefs comme très exigeants ou caractériels ce qui reste des euphémismes pour ne pas dire violents. De plus, la gastronomie est un secteur trop important en termes de PIB et de rayonnement gastropolitique. On se fout de savoir ce qui se passe dans les coulisses tant que les richissimes clients étrangers viennent dépenser leur argent : c’est l’image de la France qui est en jeu, son excellence culinaire. Dans son livre Une culture du viol à la française, Valérie Rey-Robert montre l’exception culturelle française quand on parle de violences sexuelles. On l’a d’ailleurs constaté avec les tribunes sur la galanterie et la drague « à la française » au tout début du mouvement #MeToo. On est latins, donc on serait naturellement tactiles, on s’embrasse, on flirte… et les autres seraient des puritains. Faire passer des agressions sexuelles pour de la drague, ça en dit long sur notre société, y a du boulot !

 

C’est une chose fantasmé d’ailleurs.

C’est ça ! Une vision fantasmée d’un soi-disant âge d’or où les hommes étaient de « vrais » hommes, etc. Mais c’est un fantasme réactionnaire et complètement aberrant d’un point de vue historique ou sociologique.

 

Faudrait-il, pour compenser la sous-représentation des femmes en tant que Cheffes, appliquer des quotas ?

Imposer des quotas est un constat d’échec à l’échelle de notre société profondément inégalitaire et qui perpétue les discriminations. Je sais que beaucoup de gens sont opposés aux quotas et je comprends leurs arguments. Mais si on privilégie l’embauche d'une femme noire plutôt qu’un homme blanc, c’est parce qu’elle est aussi compétente, ce n’est pas uniquement pour son genre et ses origines ethniques ! Je le rappelle toujours mais c’est important de le dire, les discriminations sont systémiques. Ce sont des systèmes de discrimination et d’oppression visant à empêcher des personnes d’accéder à des postes à responsabilité. Les quotas mettent le pied à l’étrier et donnent du pouvoir à des gens qui, espérons-le, pourront mettre en place ce qu’ils ne pouvaient pas faire auparavant. Les représentations médiatiques et culturelles, pouvoir s’identifier à des gens, c’est la clef !

 

« Cette année encore, il n’y a que 4 candidates présentes à Top Chef. Ce n’est pas la production qui use de discriminations mais, en tant que cibles privilégiées sur les réseaux sociaux, beaucoup de femmes s’abstiennent de s’inscrire »

Malgré leurs limites, les quotas reconfigurent le système de l’intérieur. Les quotas de genre seraient plus simples à mettre en place puisque ce sont les personnes elles-mêmes qui disent : je suis une femme, un homme ou une personne non binaire. En revanche, en ce qui concerne les discriminations homophobes ou raciales c’est plus compliqué… Par exemple, j’ai ce qu’on appelle un « white passing », c’est à dire que je passe pour une blanche même si j’ai des origines kabyles. Puisque je suis moins discriminée que quelqu’un qui n’a pas ce white passing, est-ce que je bénéficierais des quotas ? Serais-je considérée comme faisant partie des minorités ? Il y a aussi les discriminations envers les personnes obèses… Je crois que je n’en ai jamais vu servir dans un restaurant. 

 

C’est très rare. C’est peut-être plus commun dans les villes moyennes de province.

Clairement, à Paris, c’est la Fashion Week même en salle : tu dois être mince, correspondre aux canons de beauté actuels… Côté cuisine, certains n’embauchent pas de personnes grosses parce qu’elle prennent trop de place !

 

Beaucoup de femmes ayant été agressées en cuisine fuient le métier, ce qui instaure un cercle vicieux (minoritaires elles ne peuvent influer positivement les comportements en cuisine).

Le sexisme, la misogynie systémique c’est ça. C’est une entreprise de découragement et d’empêchement comme pour les personnes non-blanches ou homosexuelles. Cette année encore, il n’y a que 4 candidates présentes à Top Chef. Ce n’est pas la production qui use de discriminations mais, en tant que cibles privilégiées sur les réseaux sociaux, beaucoup de femmes s’abstiennent de s’inscrire… si des candidates font preuves d’autorité elles se font défoncer sur Twitter et Instagram. Elles sont également attaquées sur leur physique ou leur voix. Plusieurs candidates ont très mal vécu leur passage dans l’émission. 

 

Lors de notre entretien avec Olivier Gergaud nous faisions référence à Margot Lecarpentier pour illustrer les difficultés qu’éprouvent les femmes à obtenir des financements. 

Oui, Margot en a parlé pendant longtemps. Je l’ai croisé l’autre jour et elle m’a raconté qu’un banquier lui avait dit : Vous ? Vous voulez être barmaid ? Avec vos petits bras ? Vous voulez shaker des cocktails ? En fait, il y a une présomption d’incompétences. Il y a eu une expérience il y a 2-3 ans où des entrepreneuses s’étaient inventées un collaborateur masculin. On répondait aux mails de ce dernier beaucoup plus vite et gentiment, avec plus de connivence, on le prenait plus au sérieux et je crois qu’il pouvait même proposer des tarifs plus élevés. Les femmes ont toujours été traitées comme des mineures et c’était déjà le cas à l’époque de la Rome antique. En France, le code napoléonien - publié en 1804 - soumettait les femmes mariées à l’autorité de leurs maris en instituant l’incapacité juridique de la femme mariée. Ainsi, elle n’ont obtenu le droit d’ouvrir un compte en banque et de signer un contrat de travail sans l’aval de leurs maris qu’en 1965 ! Le droit de vote ? 1945.

 

« Ça s’appelle une agression sexuelle ; c’est pas JUSTE une main au cul »

Surtout qu’on arrête de nous dire : vous devriez être contentes avec ce que vous avez maintenant ! On devrait être contentes de quoi ? Des 200 féminicides annuels ? D’être payées 25 % de moins ? De se farcir le congé mat’ seules ? Le storytelling qui est privilégié, comme aux Etats-Unis avec le mouvement des droits civiques des Afro-Américains, ça reste : ON a donné des droits à des gens qui le réclamaient. Non ! Des femmes se sont battues pour. Les dominants ne donnent pas de droits aux dominés ; ils n’ont aucun intérêt à le faire. Les suffragettes britanniques étaient d’une violence inouïe, mais parce qu'on n’obtient rien si on demande gentiment. Elles cramaient des maisons (en prenant soin qu’il n’y ait personne à l’intérieur), il y en a même une qui s’est jetée sous les sabots d’un cheval de course pour attirer l’attention sur leur combat ! Ce sont des femmes qui ont risqué leurs vies, sont allées en prison… pour un truc aussi… évident que de donner le droit de vote à l’autre moitié de la population. Elles ne demandaient pas un traitement de faveur, seulement l’égalité. Elles étaient mises au banc, marginalisées, insultées dans les médias. Ce que les féministes réclament ce n’est pas un matriarcat, il n’est pas question de dominer les hommes, d’inverser la situation. C’est la volonté de faire exploser ce système de domination masculine, ce patriarcat, pour vivre dans une société égalitaire avec un partage du pouvoir et des privilèges qui en découlent.

 

Devrait-on miser sur le communautarisme - à l’instar de ce que l’on voit aux Etats-Unis au sein de la communauté afro-américaine - avec des banques entièrement dédiées aux financements des projets entrepreneuriaux féminins  ?

A l’image des quotas, ce serait un constat d’échec. C’est malheureux mais si les banques classiques ne sont pas capables de faire confiance aux femmes, créons un truc de notre côté à l’image des réseaux d’entrepreneuses. On ne se rend pas compte à quel point les stéréotypes et les caractéristiques codés comme féminins ou masculins ont un impact dans la vie de tous les jours.

 

Comment remédier à ce sexisme ?

Par l’éducation. Cela doit commencer dès la crèche et se poursuivre tout au long de la vie par le biais de formations, d’ateliers de prévention et de sensibilisation. On a besoin de reconfigurer la société. On ne peut pas aller vers un modèle équitable et égalitaire entre femmes et hommes si on ne détruit pas cette hiérarchie entre les genres. On doit arrêter de coder les choses comme féminines ou masculines et cesser d’inférioriser le féminin au masculin. Il est également primordial d’apprendre à caractériser les violences. La culture du viol c’est tout ce système qui minimise les violences sexuelles et responsabilise les victimes au lieu des agresseurs. Ce n’est pas parce que t’as mis une mini-jupe que le mec a le droit de te mettre une main au cul ! Ça s’appelle une agression sexuelle ; c’est pas JUSTE une main au cul. Une fellation ou une pénétration digitale forcées ce sont des viols, et des femmes n’en ont pas conscience. On devrait toutes être en mesure de discerner ce qui relève du harcèlement, de l’agression ou du viol. Avec Camille Aumont Carnel, la créatrice du compte Instagram « Je dis non chef ! », qui publie des témoignages de victimes de violences en cuisine, nous avons mis en ligne un questionnaire, en mars 2020, portant sur les violences dans le milieu de la restauration. Et je constate, au travers des témoignages, que beaucoup de femmes ne réalisent que plusieurs mois, ou des années après, que ce qu’elles ont vécu portent un nom et est délictueux ou criminel.

 

« Si ton Chef, ton pote, ou ton collègue, te touche les fesses et les seins ou t’embrasse de force ou par surprise, il y a absence de consentement donc c’est une agression sexuelle »

Certaines ne caractérisent les violences subies que depuis le mouvement #MeToo, grâce à d’autres témoignages. Pour d’autres c’est en parlant avec leur entourage ou à des journalistes comme moi. C’est tellement compliqué de se rendre compte, de réaliser, de prendre conscience de ce qu’on a vécu, de le {soupir} processer comme on dit. Si ton Chef, ton pote, ou ton collègue, te touche les fesses et les seins ou t’embrasse de force ou par surprise, il y a absence de consentement donc c’est une agression sexuelle. Dernier point sur lequel nous manquons cruellement de connaissances en règle générale : nos droits. C’est quelque chose que je constate quasi systématiquement lors des échanges téléphoniques avec les victimes de violences en cuisine  (physiques, verbales, sexuelles, racistes, homophobes, etc.). Personne n’est au courant des délais de prescription où des poursuites pouvant être engagées. A quoi sert l’éducation civique ? Ne peut-on pas nous apprendre nos droits ? Juridiques, par exemple ? Porter plainte, comment ça se passe ? Moi, j’ai appris grâce au collectif « Nous toutes » qu’on peut porter plainte via un courrier adressé au procureur de la République¹. C’est dingue de ne pas l’avoir su avant mes 33 ans ! Quant à l’éducation sexuelle, il n’y en a pas ; on éduque à la reproduction sexuelle. Il faut apprendre aux jeunes, aux enfants, aux ados tout ce qu’il y a dans sexualité : l’éducation au corps, au consentement, à ses droits en tant que personne. Dire aux filles et aux garçons que le consentement peut être exprimé à n’importe quel moment d’un acte sexuel, c’est ultra important. Le nombre de femmes qui se mettent la pression en disant : je peux plus dire non maintenant, je suis dans son lit.

 

« Si moi je le sais, les journalistes gastronomiques dans le métier depuis 15 ans le savent forcément »

Bien choisir son employeur devient essentiel, en cas de problème les conséquences peuvent porter préjudice pour la suite d’une carrière, non ?

Ils en jouent clairement. C’est pour ça que la phrase : « pourquoi t’as rien dit ? » me rend dingue. A qui je parle si c’est mon chef le fautif ? Les femmes parlent, le problème c’est que pas grand-monde ne les écoute, ne les prend au sérieux et qu’il y a rarement des conséquences pour ceux qui les agressent ou les harcèlent. Il y a aussi que dans la restauration, comme dans d’autres secteurs, tout le monde se connaît. Si tu t’es barré parce que ton Chef te harcelait et que t’as ouvert ta gueule, ça va se savoir. J’ai l’exemple d’une femme qui, elle, n’a rien subit mais a été témoin. Elle s’est abstenue parce que son patron a une influence de dingue sur Paris et que par conséquent elle craignait pour la suite de sa carrière de pâtissière dans les palaces. Il y a clairement une omerta et les médias en sont complices.

 

Il existe une dépendance des médias ? 

Il y a une co-dépendance, des conflits d’intérêts… et une hypocrisie certaine : d’un côté certains médias publient des papiers sur les violences en cuisine, de l’autre ils font un portrait de Chef notoirement connu pour traiter ses équipes comme de la merde. Parce que si moi je le sais, les journalistes gastronomiques qui font ce métier depuis 15 ans le savent forcément. De plus en plus de patrons de presse investissent dans des restos, des groupes de luxe…{soupir} Si X a dans son giron un grand journal, une chaîne de télé et des parts dans un restaurant triplement étoilé, il y aura des pressions sur les journalistes qui, en tant que contractuels, ne peuvent rien faire. J’ai bon espoir que ça change, la presse indépendante d’investigation commence justement à émerger en raison de ces conflits d’intérêts… Et en tant que journaliste indépendant, pigiste comme on dit, il faut avouer que c’est un sacrifice de faire de l’investigation ! Cela prend des mois d’enquêter sur un sujet mais en attendant, il faut bien payer les factures. Donc t’es obligé de travailler sur plusieurs projets en même temps… C’est pour cette raison que je mets énormément de temps à sortir des choses sur les violences en cuisine. Les grands quotidiens ou magazines nationaux, s’ils le décident, ils me piquent une enquête et la sortent bien avant moi… c’est David contre Goliath. L’autre problème réside dans l’homogénéisation des tarifs journalistiques. Que tu produises un simple édito ou une enquête exigeant des recherches, des lectures, des intervenants, etc., tu es payé pareil. Il y a eu une mauvaise négociation du virage internet et on s’est tous habitués à l’info gratuite. Quand les médias passent avec un abonnement ou un paywall de 5 articles… les gens râlent quand tu postes un article réservé aux abonnés sur les réseaux. Mais vous croyez qu’on est payés comment nous ? (Rires) Evidemment que c’est payant ! J’ai passé 3 mois dessus !

Et vous, comment la libération de la parole des femmes a-t-elle influencé vos décisions de chef·fe d'entreprise ?

#MeToo | Faiminisme | Steaksisme


¹lien vers le modèle de courrier sur le site du gouvernement


Propos recueillis par Yohan Guyonnet co-fondateur de l'agence web Poona à La Rochelle